Bravo Daniel pour cet article. Tu as mille fois raison de dénoncer l'omnipotence d'Elon Musk qui contrôle à peu près tout. A la vitesse à laquelle il est lancé, je doute que quelqu'un puisse désormais l'arrêter. A l'heure où l'on parle sans cesse de concurrence, on n'a jamais laissé se bâtir autant d'empires écrasant tout sur leurs passages, les hommes (et les femmes) en premier.

Le milliardaire Elon Musk poursuit son chemin vers l’omnipotence.
Tant qu’il en était à démontrer qu’on pouvait faire circuler de l’argent en dehors des circuits bancaires traditionnels, à fabriquer des centaines de milliers de véhicules électriques en partant de rien et surtout à les vendre en surfant sur une communication anthologique, à mettre au point en un rien de temps et à utiliser régulièrement, un vecteur spatial fiable, récupérable, faisant la nique aux agences nationales de fait ringardisées, il s’attirait l’étonnement admiratif et envieux de ceux dont il piétinait allègrement les plates-bandes.
Au passage, ce parcours abonde dans le sens des tenants du privé supérieur au public, du genre, voyez à quelle vitesse il a édifié son empire face à tous ces incapables encroûtés dans des traditions et autres carcans ennemis de la liberté d’entreprendre. Et à faire oublier, en communicant d’exception, tout ce qu’il doit aux recherches fondamentales et appliquées menées par d’innombrables laboratoires publics œuvrant d’abord et avant toute intention marchande, à une meilleure connaissance du monde et des phénomènes qui le régissent.
Certains signes montraient cependant qu’un nouveau cap allait être franchi.
Son obstination à enquiquiner les astronomes en plaçant des milliers de petits satellites en orbite basse au prétexte de permettre à tout un chacun, depuis quelque endroit de la planète, de communiquer avec le reste de l’humanité sans limites, en a étonné plus d’un. D’autant que l’investissement n’est pas anodin, même si cela fait turbiner ses lanceurs !
Le rachat de Twitter est la pièce manquante : mes fusées et mes satellites vont permettre à une libre parole de se répandre sur la planète, sans contraintes ni censure ! Voyez comme je vire sans complexe les quelques modérateurs qui s’opposaient encore à une totale liberté d’expression sur le bidule dont je viens de m’emparer !
Il y a de quoi être terrorisé à l’idée du tombereau de haine sans limites qui va nous tomber du ciel ! Aux mains d’un individu plus puissant que bien des états, ne représentant que lui et son idéologie libertarienne plus que néolibérale, cet outil va creuser encore plus vite le tombeau des sociétés, les pulvérisant plus qu’elles ne le sont déjà, en mosaïques délabrées de coteries ennemies de toutes les autres, ne pouvant plus lui opposer la moindre résistance collective. La liberté totale pour lui et ses semblables, qui jouissent du pouvoir de l’argent.
Je suis très inquiet de l’émergence de tels pouvoirs, nourris de la noble idée de liberté, chérie de tous, donc populaires car ils font rêver.
Mais de quelle liberté parle-t-on ici, à part celle d’agir pour son seul profit à l’exclusion de tout le reste ? D’une liberté hors sol, jalousement individuelle, faisant abstraction de celles des autres, une liberté inhumaine.
Comme tout concept, la liberté n’échappe pas à son contexte. Jusqu’à plus ample informé, nous ne sommes pas des ours, nous vivons en sociétés organisées, cimentées par des règles permettant la cohabitation des égos dans une coopération générale qui s’oppose aux menaces existentielles.
Pour toute société, la liberté a donc un mode d’emploi qui en limite clairement le champ et repousse la loi de la jungle. Ce n’est pourtant pas une évidence pour les fanatiques du Grand Marché Libre qui, obsédés par ce Graal, ne comprennent pas qu’ils sont eux-mêmes la principale menace à leur pouvoir sans limites, qu’ils scient la branche sur laquelle ils sont assis. Bien fait pour eux, dira-t-on, sauf que nous serons tous entrainés dans leur chute, il n’y aura que des perdants.
Le monde politique doit se réveiller daredare et s’opposer à la prise de pouvoir rampante menée par quelques milliardaires habiles à vendre des chimères. Il y a urgence, alors qu’un autre milliardaire met en service un métavers où l’on pourra virtuellement vivre à sa guise, en toute liberté, vautré sur son canapé. Où seront alors les troupes de l’humanité menacée dans son essence même ? Échec et mat.
A moins qu’un petit malin parvienne à couper le courant… On est peu de choses.