Jeudi 27 mai, sortie de la cinquième bande dessinée construite sur le texte de George Orwell, « 1984 », passé dans le domaine public.
Une vraie ruée vers l’or, tout à fait inhabituelle à un moment pourtant ou beaucoup de scénaristes de bandes dessinées adaptent de grands textes littéraires. Mais cinq fois ?
Qu’y a-t-il dans « 1984 » qui pousse tant à s’y frotter ?
Ceux qui l’ont lu version texte, rejoins aujourd’hui par les gros bataillons des amateurs de petits mickeys, savent que c’est une dénonciation glaçante des régimes totalitaires, quels qu’ils soient, vus de l’intérieur, dans le détail des modes d’action et comportements humains.
« 1984 » fait partie de ces rares textes à avoir donné naissance à des archétypes passés dans le langage courant : novlangue, Big Brother, etc.
Big Brother, justement, parlons-en ! Un regard perpétuellement penché sur vous, même durant vos moments d’intimité, auquel rien n’échappe, dont les télécrans et les micros colonisent tous les lieux de vie, un regard qui peut déclencher mort et châtiments, glorification ou effacement de l’histoire. Un regard omnipotent, omniprésent, omniscient, à la fois juge et bourreau, dictant sa loi à coups de slogans stupéfiants.
Cela ne vous dit rien ?
Je vous aide avec ces mots célèbres de Victor Hugo tirés du poème « la Conscience », partie de « La légende des siècles « :
« Quand il se fut assis sur sa chaise dans l’ombre
Et qu’on eut sur son front fermé le souterrain,
L’œil était dans la tombe et regardait Caïn. »
Orwell ne nous a-t-il pas réinventé l’Ancien testament à sa manière, une sorte de Dieu avec ses trois commandements ?
« La guerre, c’est la paix,
La liberté, c’est l’esclavage,
L’ignorance, c’est la force. »
Et le Parti, son clergé, le Parti intérieur, ses prêtres. Et le reste de l’humanité, la masse, tenue dans le plus profond mépris, inculte et miséreuse.
Et ces missiles et obus qui tombent au hasard, n’importe quand, aux trajectoires aussi impénétrables que les voies de Dieu ! Tout comme les modifications incessantes opérées sur l’histoire au sein du Ministère de la vérité. Un monde où il n’y a pas de « pourquoi ? ».
Un univers terrifiant alimentant une trouille éternelle comme s’il était encore besoin d’abonder celle, native, que nous éprouvons tous face aux incertitudes de l’existence et que nous tentons de combattre en acceptant tout ce qui peut nous rassurer fut-ce au prix d’une servitude volontaire et d’un lavage de cerveau permanent.
A croire que nous ne sommes vraiment pas compatibles avec l’idée de liberté, bien plus inquiétante que le giron confortable de Pater familias inventés pour la circonstance ?
Dieu le Père, Big Brother, et aujourd’hui Saint Friedman et les GAFA.