Je reviens sur l’Ukraine. C’est de saison.
Vlad 1er avait visiblement envisagé une campagne rapide en dépêchant plusieurs poings blindés sur des objectifs majeurs, après avoir préparé le terrain à coups de missiles et de frappes aériennes.
L’affaire a commencé à déraper lorsque l’armée russe a échoué à s’emparer de l’aéroport de Kiev, opération téléphonée car tellement emblématique de ses usages forgés durant la guerre froide. Je me souvins parfaitement des missions de mon régiment de réserve à la fin des années 70 et durant les années 80, qui devait s’opposer aux opérations aéroportées en profondeur prévues dans les plans des armées du Pacte de Varsovie.
Et depuis, ça n’avance pas plus vite, ça casse tout ce que ça peut pour maintenir la pression sur des Ukrainiens teigneux dont la cohésion et la mobilisation n’avaient pas été modélisées dans les équations russes. Des Ukrainiens bien placés pour connaitre par cœur les tactiques de l’adversaire et les contrer en usant de toutes les circonstances et les stratagèmes possibles.
Vu de loin et pour ce que l’on sait du déroulement des opérations, ce conflit est très représentatif d’une guerre asymétrique, celle où la force brutale et rigide de l’agresseur est contrebalancée par la détermination et la souplesse opérative de l’agressé qui combat sur son terrain et avec le soutien d’une population toute entière vouée à la défense du pays. Ajoutez à la sauce un chef au talent inattendu et courageux, vous avez une purge difficile à avaler pour quelque armée que ce soit, l’histoire du monde étant pleine d’épisode de ce genre.
Alors, faute d’avoir réussi sa blitzkrieg, Vlad 1er est à présent bien embêté d’avoir cristallisé le sentiment national ukrainien, d’avoir réveillé l’Europe endormie sur ses dividendes, d’avoir lancée son armée impréparée dans une aventure pétrie de mensonges à sa population qui se libérera vite de la propagande qui l’assomme à la vue des innombrables cercueils de ses fils.
Que va-t-il se passer à présent ? Il est évident que cela doit discuter ferme derrière les rideaux des chancelleries. Cela se terminera-t-il par un traité imposé par le bon sens et quelques amis pesants, où par une apocalypse qui aura fini par arriver, quand on a des armes, on est tenté de s’en servir…
Mais déjà, on peut tirer quelques enseignements de ce bazar.
Le premier, c’est qu’il ne faut pas laisser pourrir une situation et que le mépris n’est pas une politique. En effet, en remontant des années en arrière, on constate objectivement que la Russie a souvent été mise devant le fait accompli de promesses non tenues, de non-respect des usages internationaux. Rappelez-vous de ce qui avait été convenu entre Gorbatchev et les occidentaux à la chute de l’URSS en 1991 : l’OTAN n’en profiterait pas pour s’approcher de la Russie. Raté.
Rappelez-vous le conflit dans l’ex-Yougoslavie des années 90, une guerre atroce et multiple où les Russes liés aux Serbes ont été baladés souvent par l’entrisme une OTAN pressée d’arrêter le massacre.
En retour, Vlad 1er ne s’est pas gêné pour intervenir et envahir de ci de là dans son ancienne sphère d’influence, sans plus se préoccuper des usages : Tchétchénie, Géorgie, Moldavie, Crimée, Arménie et Azerbaïdjan, Donbass et enfin Ukraine. Ne parlons pas des reculs incessants des libertés en Russie qui relèvent de la politique intérieure du pays et de l’adhésion d’une bonne partie de la population.
On le voit bien ici, lorsque des bourriques n’ont font qu’à leur tête, on finit par se battre. Le coche a été raté à mon sens en 1991, lorsque les républiques nouvellement indépendantes de l’ex-URSS auraient pu adopter un statut identique à celui de la Finlande protégée par le traité de Paris signé en 1947 avec Staline qui, à l’époque représentait une toute autre puissance que Vlad 1er aujourd’hui.
Le second, c’est à nouveau le constat qu’un peuple en armes et déterminé représente une force de dissuasion absolue, sauf à vouloir le rayer de la carte.
Encore faut-il le faire savoir aux voisins, qu’ils soient convaincus que non seulement la population ne se laissera pas faire, mais qu’elle est instruite et préparée à prendre les armes, à user de sa maitrise de son terrain pour pourrir la vie de tout agresseur, de le forcer à mettre tant d’hommes et de moyens dans des batailles interminables, que le jeu n’en vaut pas la chandelle et qu’il vaut mieux discuter. Et puis, à qui bon s’emparer d’un pays après l’avoir complétement démoli et massacré ses habitants ?
Le troisième est que rien n’est jamais acquis : les dividendes de la paix sont purs fantasmes, le chaos de la politique pouvant retourner des situations considérées à tort apaisées en un rien de temps. Nous découvrons aujourd’hui les tristes résultats d’un tel aveuglement : stupéfaction devant le retour de la force brutale, armées affaiblies voire inexistantes, populations totalement étrangères à tout esprit de défense au-delà de supporter de foot, ignorance générale de ce qu’est la notion d’engagement pour plus que soi. S’il nous fallait aujourd’hui nous mobiliser face à une attaque soudaine, massive et brutale, nous serions vite conduits à déclarer la France pays ouvert pour éviter un massacre inutile et se résigner à une nouvelle occupation en se frappant le front pour expier notre connerie passée.
Le quatrième est que nous devons nous réveiller daredare et comprendre que la seule défense qui vaille est celle qui est l’affaire de tous. J’y reviendrai.

Bonjour Daniel, je n'ai pas le temps maintenant de lire le texte, mais en découvrant le titre, j'avais lu : Le peuple en larmes ...
Comme quoi !
Merci pour tes ces lectures ...

Bonjour Daniel

Au titre des dividendes de la paix, on a oublié un peu vite un principe bien connu : "Si vis pacem, para bellum".
Moyennant quoi les pays européens se retrouvent contraints aujourd'hui de consacrer des sommes considérables pour remettre leur outil de défense à flot alors même que nous sommes en crise et que notre dette explose.