La grande confusion autour de la pandémie et des mesures qui sont prises pour l’endiguer, jette une lumière crue sur une perte de repère générale alimentant malentendus et incompréhension.
Nous sommes entrainés dans une lutte confuse entre libertés individuelles et liberté collective qui divise les citoyens de ce pays et n’a en fait, pas lieu d’être.
Alimentée par des médias aussi pyromanes qu’inconséquents dans leur course à l’audience et aux recettes publicitaires, attisée par les tempêtes infernales agitant les réseaux sociaux, nourrie par les querelles d’égos de scientifiques qui galvaudent des débats habituellement internes et audibles d’eux seuls qui en connaissent les règles, la bataille des pour et des contres n’en peut plus de durer et de brouiller la compréhension de ce qui est en cours : le blocage de tout débat constructif entrainant celui du retour à une vie sociale et économique normale.
Ainsi, la liberté durement acquise de pouvoir exprimer librement son opinion s’est transformée en arme de guerre contre les décisions collectives indispensables à la résolution de cette crise toute aussi collective, nous forçant à patauger sans boussole dans le marécage gluant et nauséabond des ordres et des contrordres.
Notre régime de démocratie participative se trouve remis en question par l’exercice sans limites des libertés individuelles qui sont pourtant censée renoncer dès qu’un représentant se voit reconnaitre par son élection, le droit de parler au nom de tous y compris ceux qui n’ont pas voté pour lui. Cette acceptation est la base du système ! Et sa faiblesse, visiblement.
Nous avons ici souvent parlé des raisons qui nous ont menées à cette situation ubuesque où des gens libres de leurs opinions s’opposent de fait à un système démocratique dans lequel ils ne croient plus, alors que c’est l’usage qui en est fait qui devrait être dénoncé. A force de vouloir être dans le soleil, nos élus et leurs multiples conseillers ont perdu le nord de l’intérêt général en créant injustice et inéquité pour se sortir des situations invraisemblables créées par leurs valses hésitations.
Le pass sanitaire est emblématique de cet embrouillamini qui va mener une moitié de la population à surveiller l’autre en dehors de toute légalité commune ! A croire qu’on nous prépare l’avènement d’un Big Brother dilué dans la société toute entière ! Donc indéracinable.
Alors, je me demande si, dans notre société de plus en plus individualiste et jalouse de ses acquis, la liberté individuelle est bien compatible avec un système de démocratie participative ! Si chacun campe sur ses positions construites on ne sait comment mais bien sûr de manière incontestable, comment peut-il être possible de mettre en place les actions collectives pouvant venir à bout d’une pandémie ?
Aujourd’hui, la réponse de notre système politique est de plus en plus autoritaire, faute de parvenir à convaincre des gens qui ne veulent plus rien entendre par individualisme, arrogance, lassitude, conviction, idéologie, contradiction, inconséquence, irresponsabilité ou je ne sais quoi de pire… Ou parce qu’ils en ont marre d’être pris pour des imbéciles.
La démocratie participative ne peut fonctionner qu’avec l’aval de tous, qui prime sur l’avis de chacun étant entendu qu’on doit accepter parfois la prééminence d’idées autres que les siennes, celles de la majorité. A la différence d’une dictature qui ne demande que l’aval d’un seul, elle se fragilise lorsque l’adhésion à ces principes se fissure, jusqu’à s’écrouler au grand dam de ceux qui l’avaient oublié et qui, repassés sous le joug d’une de ces personnes providentielles qui grouillent en de telles périodes, connaitront le prix exorbitant à payer pour revenir au moins pire des mauvais systèmes !

Tu écris que la démocratie participative ne peut fonctionner qu'à condition d'accepter la prééminence d'idées autres que les siennes, celles de la majorité. Dans l'absolu, tu as raison. Encore faut-il qu'il y ait une majorité ! Les taux d'abstentions que l'on connait maintenant aux diverses élections font que la majorité est en fait très minoritaire (souvent moins de 20 % des inscrits). Comment, dans ces conditions, prétendre représenter le peuple ? La question de l'abstention est donc au coeur du problème. Malheureusement, en dehors des débats les soirs d'élection, qui en parle ?

Cette remarque pertinente me permet d’aborder de nouveau un autre sujet : la prise en compte du vote blanc comme expression d’une opinion politique.
Jusqu’à présent, nos élus se sont opposés à cette mesure de bon sens, peut-être parce qu’ils n’imaginent pas une seconde qu’il puisse exister d’alternatives à ce qu’ils proposent, qui relèverait notamment de conceptions différentes de cette pensée unique néolibérale défendue bec et ongle, toutes tendances confondues, n’en déplaise à certains qui gesticulent beaucoup sans attaquer jamais le mal à sa racine.
L’acceptation du vote blanc aurait à mon sens plusieurs conséquences favorables à la démocratie participative.
Il permettrait de mesurer le volume d’opposants hors sentiers battus en les séparant des décrocheurs.
Il permettrait d’attirer ceux qui ne viennent pas aujourd’hui voter parce qu’ils sont canalisés de fait sur des choix qui les révulsent, ils auraient au moins la possibilité de le faire savoir !
Il permettrait de mesurer la représentativité des lauréats et, allons plus loin, du fait d’une meilleure visibilité du champ des opinions exprimées, justifierait qu’on puisse récuser un élu avec un trop petit pourcentage de suffrages exprimés.
La démocratie représentative en sortirait renforcée, d’autres idées pourraient peut-être faire leur chemin et ouvrir une brèche dans la forteresse néolibérale qui aujourd’hui, bloque tout débat de fond.
J’ai cependant bien peur que, pour toutes ces raisons, il soit bien difficile d’imposer une telle modification du code électoral à un personnel politique qui prospère dans le statu quo.

Complètement d'accord avec l'acceptation du vote blanc qui permettrait pour l'essentiel de mesurer "la représentativité des lauréats".
Logiquement il faudrait que le(les) lauréat(s) atteigne(nt) plus de 50% des suffrages réellement exprimés. En réajustant au fur et à mesure les propositions de manière à diminuer le % de votes blancs par un nouveau vote. Mais combien de tours d'élections peut-on s'autoriser en sachant que c'est déjà difficile de mobiliser des électeurs au 1er tour ?

Le diable est effectivement dans les détails, mais le jeu en vaut la chandelle. Voter par approximations successives peut paraitre un peu lourd, mais que ne ferait-on pas pour le retour en grâce de la démocratie participative ?
Cette démarche riche en perspective ne pourra cependant pas être mise en place tant que les élus chercheront à faire carrière en manœuvrant pour cela.
La prise en compte du vote blanc et de ses suites devra avoir comme préalable le mandat unique dans une fonction donnée, garant du courage politique de l’élu, nécessaire pour défendre de vraies convictions et admettre que des propositions adverses peuvent être utiles à la modération des siennes.