Quitte à vous intriguer avec cette entame énigmatique, jouons au puzzle un instant …
Depuis quelques décennies, l’entrée des jeunes dans la vie active est de plus en plus perturbée et difficile, comme s’il n’y avait pas de place pour eux dans un système économique qui réclame à minima dix ans d’expérience pour considérer favorablement une candidature à un poste de balayeur, au tarif le plus bas possible bien sûr. A contrario, on se lamente de n’en pas trouver dès qu’il s’agit de fournir les métiers en tension, ceux dont personne ne veut car méconnus, déconsidérés, difficiles, même s’ils sont bien rémunérés. Allez comprendre, c’est comme le chat de Schrödinger qui est à la fois vivant et mort, les jeunes, on en veut et on n’en veut pas !
Par ailleurs, ce même système fait pression pour repousser de plus en plus l’âge de la retraite alors qu’en même temps, il tend aussi à virer tout ce qui dépasse quarante-cinq ans, au plus grand mépris de l’expérience acquise, la même qui est exigée des plus jeunes. Allez comprendre, tiens, le chat !
On dépense des sommes folles pour former certains jeunes bien nés sans pour autant s’inquiéter de leur offrir les débouchés à la hauteur de leur excellence, abondant ainsi gracieusement les laboratoires étrangers et les multinationales de talents qui nous échappent, mais on ne se soucie pas de former dans la même excellence tous ceux qui sont indispensables à l’intérêt général ! Allez comprendre, on donne à qui ne servira pas, on ne donne pas à qui servira ! Toujours le chat …
D’autre part, on voit de plus en plus de jeunes, diplômés ou pas, se détacher petit à petit de la contrainte travail pour ne l’accepter qu’en vue de financer de longues périodes de fun ou qui filent à l’étranger, le plus loin possible pour vivoter de petits boulots, comme si imiter leurs parents leur faisait horreur ! Je travaille, je ne travaille pas, encore le chat …
Je n’ose pas parler ici des gars qui tiennent les murs dans les quartiers faute de formation et aussi de boulot, rejoignant les bataillons de petites mains qui s’enferrent au service des caïds locaux, entamant ainsi un long parcours taule-quartier, etc. en forme de double enfermement, à la fois morts et vivants dans un monde qui n’a pas besoin d’eux. Le chat …
Et que penser de ceux qui gueulent un jour contre les atteintes intolérables à leurs libertés pour réclamer le lendemain des caméras et des flics partout au prétexte qu’ils se sentent en danger dès qu’ils pointent le nez dehors ? En même temps, liberté et contrainte. Ah, ce chat !
On pourrait continuer longtemps à pointer ces contradictions qui pourrissent notre société et minent certains de ses fondements et notamment son devoir de protéger les plus faibles.
Reste une interrogation fondamentale : comment fait-elle, en toute connaissance de cause, pour ne pas agir ? Quelles sont les forces souterraines qui entravent ses immenses capacités, ses moyens colossaux ? Comment peut-elle se vautrer jour après jour dans des incertitudes et des indécisions qui ne mènent qu’à l’inaction ?
J’ai ma petite idée pour assembler ce puzzle, que j’ai souvent avancée ici, comme une obsession qui n’en est pas une, seulement le constat impuissant de la pénétration des principes ultralibéraux au plus profond des esprits, touchant toutes les classes sociales, de ceux qui protègent leurs privilèges à ceux qui en rêvent, tous unis dans une pensée unique tellement verrouillée depuis des décennies qu’il n’est même plus possible d’imaginer que le monde puisse fonctionner autrement qu’il ne le fait.
Cette pensée unique interdit par construction tout débat, toutes pensées différentes, toute créativité, toute originalité, bien calée sur ses rails, les intérêts des uns servant à faire rêver les autres. Pas de chemins de traverse. Elle est imposée par des organes sans visages, élus par personne, résidant on ne sait où, infiltrée partout à coup de noyautage de la formation et de corruption des futures élites mais surtout d’une propagande éhontée vers tout un chacun. Elle se présente comme une vérité incontestable devenue plus forte que les religions et autres idéologies qu’elle recouvre et relie là aussi sans crainte des contradictions.
La devise du système n’est-elle pas « there’s no alternative ! », il n’y a pas d’alternatives ! TINA, le cri de guerre du couple infernal Thatcher-Reagan qui devraient être les premiers justiciables d’un hypothétique tribunal jugeant des crimes contre la société !
Que la pensée unique prospère sur les contradictions, ambiguïtés et incertitudes est ce qui me stupéfie le plus dans cette triste histoire ! C’est une transcendance de contradiction ! Un chat divin ! Bastet !

Cher Daniel.

Face à la schizophrénie ambiante je te conseille le remède le plus répandu chez nos concitoyens. Prends toi un chat domestique ;)